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Bolsin de Bougue, 28 ans de promotion de la tauromachie

Bolsin de Bougue, 28 ans de promotion de la tauromachie

A Bougue (860 habitants) village landais situé à quatre kilomètres de Mont de Marsan, depuis presque 30 ans, la Peña Soledad organise un Bolsin. Dix novilleros sont en compétition. Le vainqueur se verra offrir cinq contrats dans les arènes du Sud-ouest (dont les quatre de 1ère catégorie). Tertulias a rencontré Colette Lacomme qui nous a présenté l’histoire de ce Bolsin avant de faire un focus sur l’édition 2024.

Manuel Roman vainqueur 2022
Tertulias : « Comment est né le Bolsin de Bougue ? »

Colette Lacomme : « L’idée du Bolsin date de1995. C’est le premier à être créé en France. Lassociation Cercle Taurin Soledad a été créé en 1993. La première manifestation a été un festival du film taurin où une quinzaine de films ont été présentés. Les organisateurs se sont dit qu’il allait être difficile de se renouveler tous les ans, de trouver chaque année des films. Ils ont donc eu l’idée de s’inspirer de ce qui se faisait et se fait encore à Ciudad Rodrigo. 

Cette idée a germé dans l’esprit de trois personnes Michel Capovilla-Torres, Christophe Andiné et Lionel Cenet. En fait le premier Bolsin de Bougue a vu le jour dans les arènes de Bascons. En effet à cette époque il n’y avait pas d’arènes en dur. Les seules, qui existaient, servaient pour la course landaise. Seules étaient construites les loges pour les coursières et le jour de la Fête des arènes « portatives » étaient installées. Deux ans se sont passés durant lesquels les habitants de Bougue se sont retroussés les manches et ont construit avec l’aide de la municipalité des arènes. A l’exception du gros œuvre et la charpente qui ont été faits par des artisans, tout le reste a été réalisé par les villageois.  

En 1998, dans des arènes neuves a eu lieu le premier Bolsin de Bougue à Bougue. »

Tertulias : « La construction de ces arènes est liée uniquement au Bolsin ou bien c’était une volonté plus générale de la municipalité ? »

Colette Lacomme : « Le fait qu’il y ait le Bolsin a été un élément déclencheur pour les construire. Mais il y avait déjà un passé, une histoire de courses landaises très importante dans la commune. Le maire précédent, dont les arènes portent le nom, Monsieur Fondeviolle était un coursayre notoire. »

Tertulias : « Quelle était la formule du Bolsin à ses débuts.?»

Colette Lacomme : « La première année, tout avait été vu en grand. Il y avait quinze vaches et donc quinze novilleros. Les dépenses n’ont pas été maîtrisées. C’était l’innocence des débuts. Le résultat financier fut assez catastrophique. Comme il n’était pas concevable qu’une association ait un compte négatif, les pertes ont été renflouées sur leurs deniers personnels par des membres de la Peña Soledad. Pendant trois ans on a tenu une buvette pendant les Fêtes de la Madeleine grâce à l’ANDA. Cela a permis de se renflouer et au Bolsin de continuer.»

Tertulias : « Et par la suite ? »

Colette Lacomme : « En 2004 pour la dixième édition, afin de marquer l’évènement en plus du Bolsin, on a organisé un festival. Notre objectif n’était pas de thésauriser l’argnet que nous avions. Le festival n’a pas eu le succès escompté et toute notre avance financière a été absorbée. Nous avons donc monté, en maîtrisant les dépenses , un Bolsin chaque année sauf pendant la période du COVID. Pour y parvenir nous avons développé un réseau de partenariat auprès des entreprises privées. En 2024 ce sera la 28ème édition.»  

Tertulias : « Qui est impliqué dans l’organisation ? »

Colette Lacomme : « Le matin du Bolsin, sur la base du volontariat, des familles de Bougue, accueillent des novilleros qui viennent s’habiller chez elles. Ils s’y habillent avant les qualifications du matin, s’y changent après et pour les trois qualifiés ils y revêtiront le costume de lumières. C’est la plus grosse implication. Il y a des liens qui se tissent. Les familles essaient d’aller voir les jeunes dans les non piquées de la région. Ils vont parfois en Espagne accueillis par les familles des novilleros,

On a aussi des personnes qui viennent nous donner un coup de main. Nous sommes un petit club avec 30-35 membres. Le jour du Bolsin, nous sommes sur tous les fronts. On tient la taquilla, la buvette, le casse-croûte du matin. On sert un repas, que nous faisons par nous-même sans l’aide d’un traiteur, pour 350 personnes. Puis l’après-midi on repart aux arènes pour la novillada. Il y a des personnes des autres associations de Bougue qui viennent nous donner un coup de main. Les areneros sont des jeunes du village. »

Tertulias : « Depuis 1995, quels sont les évènements marquant du Bolsin ? »

Colette Lacomme : « Il y en a eu plusieurs. L’un d’entre eux a été la rencontre avec Niño de la Capea. On a acheté chez lui pendant de nombreuses années les novillos. Quand nous sommes allés lui présenter la philosophie de notre projet, il a été de suite séduit par l’idée. Il a accepté de suite de nous vendre des erales à un prix intéressant, en adéquation avec nos moyens limités. Cela a été sa manière de nous aider. Il est venu dans nos arènes, son fils est également venu. Le Niño de la Capea a connu des triomphes avec ses novillos. Ce n’est pas seule recontre marquante que nous avons faites»

Tertulias : « Lesquelles ? »

Colette Lacomme : « Celle avec avec Joselito, l’année où on lui acheté une novillada. A cette époque, nous faisions le Bolsin sur deux jours avec une partie des vaches le samedi, puis les autres et la novillada le dimanche.  On organisait une soirée conférence le samedi soir. Nous lui avons demandé cs’il acceptait de venir à Bougue pour en être l’invité.

Il a accepté et a tenu sa promesse. Cela a été une soirée remarquable avec la participation d’une centaine de personnes. Joselito s’est complètement livré et nous a expliqué comment il est entré en tauromachie et que cela l’a aidé à se sortir de la rue. Il s’est livré au jeu des photos, selfies et autographes. Il a été très abordable. C’est un très grand souvenir qui s’est prolongé le lendemain. Lors de la tienta des vaches de Jean Louis Darré le dimanche matin, il lui a demandé l’autorisation de monter sur le cheval pour piquer les vaches. On est dans ces cas là comme les petits gamins devant le sapin de Noel. Ce sont des moments extraordinaires.

Il y a eu la rencontre avec Rafael Cruz quand nous sommes allés chez lui pour acheter des erales. On a eu très bonnes années avec ce ganadero et ses produits. »

Tertulias : « Quels sont les toreros connus qui sont sortis du Bolsin de Bougue ?»T

Colette Lacomme : « La première fois que Talavante a mis son costume de lumières, c’est à l’occasion du Bolsin.il a gagné l’édition 2003.  

Il y a eu aussi Sébastien Castella. Il a participé deux fois au Bolsin. La première, il n’a pas pu se qualifier car il n’avait que quinze ans. Il était tout petit. Il disparaissant derrière le burladero et on n’entendait que sa petite voix. J’ai eu l’occasion de le rencontrer, il y a deux ans, à Saint Sever. Ce qui est extraordinaire, c’est qu’il se souvenait de ce Bolsin, le premier auquel il a participé avec des novillos de Cyril Colombeau. Cela fait plaisir quand on voit ce qu’il est devenu.

Tertulias : « Y’en t’il d’autres de notables ?»

Colette Lacomme : « il y a eu Cesar Jimenez, Fernando Cruz qui ont gagné le Bolsin. Juan Ortega, dont on parle beaucoup aujourd’hui, l’a gagné en 2010. Ce que nous avons pu constater sur les années passées, c’est que le temps est un peu plus long entre les périodes de la carrière des toreros. Juan Ortega, qui a gagné en 2010, a mis plus d’une dizaine d’années pour devenir un des matadors importants.

Leo Valadez 2013
Miguel Andrades 2013

Parmi les participants, il y a eu aussi Javier Cortes, et bien d’autres qui ont fait ou font carrière. Parmi les derniers vainqueurs il y a Solalito, Christian Parejo, Manuel Roman et Samuel Navalon qui fonctionnent aujourd’hui.»

Tertulias : « Comment se fait la sélection des novilleros?»

Colette Lacomme : « La règle est que les novilleros doivent faire acte de candidature. Ils doivent nous envoyer un CV, une vidéo avec une faena complète sur un eral. On est devenu un peu plus exigeant sur ce point. Il y a une exception pour les Ecoles Taurines françaises. On a toujours mis un point d’honneur à prendre des Français. On travaille en confiance avec les écoles. Nous demandons à leurs responsables de nous proposer leur élève le plus prêt à gagner le Bolsin.  Nous insistons sur le fait que l’on vient au Bolsin pour le gagner. On ne vient pas à Bougue pour faire de la figuration. Il y a un enjeu important avec les cinq contrats offerts au vainqueur dont quatre dans les arènes de première catégorie du Sud-ouest.

Habituellement nous gardions entre trois et quatre postes pour les Français. Cette année malheureusement Béziers et Arles n’ont pas d’élèves qui rentraient dans les critères de sélection. Il n’y aura que deux Français Hadrien Lucq (Adour Aficion) et Andy Martin (AFAP).

Tertulias : « Vous recevez combien de candidatures?»

Colette Lacomme : «Cette année a été exceptionnelle. Nous avons reçu 74 candidatures. C’est le record. On oscille habituellement entre 40 et 60. Le nombre élevé de candidatures est probablement une conséquence des années COVID . Il y a beaucoup de novilleros qui sont sur le marché et qui ont du mal à percer. »

Tertulias : « Le fait qu’il y ait autant de candidatures signifie-t-il que le Bolsin de Bougue a une réputation dans le milieu qui dépasse le cadre de la France?»

Colette Lacomme : « Je vais répondre que oui. Je ne le dis pour se vanter mais quand on a l’occasion d’en parler on voit que le Bolsin de Bougue éveille l’intérêt des professionnels. Il a une certaine notoriété. Ce qui fait la force du Bolsin, et je pense que ceux qui en sont en l’origine ont été très novateurs, c’est de demander à des villes comme Dax, Mont de Marsan, Bayonne, Vic et Plaisance du Gers de proposer un contrat au vainqueur. On continue ce partenariat, ses organisateurs répondant chaque année favorablement à notre demande.

En plus d’autres arènes organisatrices de non piquées comme Hagetmau, Rion, Castelnau sont présents le jour du Bolsin. C’est important pour les jeunes qui y participent. Le vainqueur peut récupérer entre 8 et 10 contrats. C’est aussi une opportunité de se faire repérer par des organisateurs qui est offerte à tous les participants. Le fait qu’il y ait des contrats à la clé est une vraie force pour notre Bolsin. »

Tertulias : « Quel est le profil, le niveau d’expérience requis participer au Bolsin?»

Colette Lacomme : « Il n’y pas de critères prédéfinis. Il y a cinq contrats réservés au vainqueur et Il faut que l’année où le jeune gagne, il ait la capacité de les assurer en particulier en restant en non piquée.  On a eu un petit bémol en 2023, avec Samuel Navalon qui est passé en piquée avant d’honorer le contrat de Bayonne. Son apoderado nous avait garanti qu’il passerait en piquée après Bayonne. C’est la première fois que cela nous arrive. 

Quand les jurys se réunissent, ils doivent avoir et ont dans l’idée que le vainqueur du Bolsin, il a des contrats à assumer en particulier dans des arènes de première catégorie. Parfois on peut hésiter sur un jeune qui manque de technique mais qui a une personnalité. C’est difficile en sélectionnant sur des vaches mais on essaie aussi d’imaginer le potentiel des novilleros face à des erales. C’est pourquoi on leur demande une vidéo face à un novillo. »

Tertulias : « Comment est constitué le jury ?»

Colette Lacomme : « Il y a trois votes. Le premier est celui des villes partenaires. Le second jury est celui des membres de la Peña Soledad. Le public est également appelé à voter en utilisant les urnes mises à sa disposition à l’issue de la tienta. Chaque jury a le même poids. Il peut y avoir des écarts de perception entre les différents jurys. De plus le vote du public est difficile à contrôler. Souvent l’écart vient du vote du public mais le système des trois jurys ayant le même poids rééquilibrent le système. »

Début de journée
Un invité surprise
Tertulias : « Qui sont les participants du Bolsin 2024?»

Colette Lacomme : « Il y a aura les français Hadrien Lucq, Andy Martin. On verra aussi le mexicain Jairo Lopez que l’on a vu à Arzacq et Aignan (ndlr: depuis qualifié pour la finale de l’Alfarero de Plata à Villaseca, il est remplacé par Jaime Padilla).  Les autres (Ernesto Lorenzo, Julio Romero, Manuel Leon, Carlos Tirado, El Exquisito, Raul Jerez, Pedro Rufo) sont inédits dans le Sud-ouest. Ce sera une découverte avec une tauromachie différente. »

Tertulias : « Le bétail sera, comme depuis quelques années, celui de Jean Louis Darré. Qu’est-ce qui motive ce choix?»

Colette Lacomme : « Il y a plusieurs raisons. Il y a eu des raisons financières liées à la proximité et comme cela donne satisfaction, nous restons sur cette relation de confiance avec Jean-Louis pour les vaches. Il connait l’esprit du Bolsin et le type de bétail qui convient bien à cette compétition. Pour ce qui des erales, nous sommes satisfaits de ce qu’il nous fournit. Il n’y a pas de raisons que cela change. Cela correspond aussi à une volonté après la COVID d’aider les éleveurs français. »  

Tertulias : « Quelle est la fréquentation de la novillada du Bolsin ?»

Colette Lacomme : « Depuis la reprise en 2022, cette fréquentation est en hausse. Nous faisons 400 à 450 entrées dans un arène de 1200 places. On a connu nettement moins. On a du avoisiner les 500 entrées, il y a quelques années, c’est difficile de faire mieux. Les non piquées, sauf dans les grandes arènes, ont une audience de cet ordre de grandeur.  

De plus, c’est un spectacle isolé qui n’est pas intégré dans le programme des Fêtes de Bougue. On est dans un petit village. Même si nous sommes proches de Mont de Marsan et malheureusement les peñas montoises ne jouent pas vraiment le jeu et ne se déplacent pas. C’est aussi le cas de celles de Dax et Bayonne. En 2020, je les avais contactées. Certaines nous ont fait un don ou ont acheté un quota de places. Cette année, certaines qui jusque là n’avaient pas pu le faire vont acheter des billets pour le Bolsin. Mais cela reste minoritaire par rapport au potentiel. »

Tertulias : « Quelle est la composition du public?»

Colette Lacomme : « Il y des gens de Bougue, de Bordeaux, du Pays Basque et du Gers. Certains viennent juste pour voir les novillos de Jean Louis. C’est assez varié mais il nous faudrait encore plus de monde. Et encore nous avons redressé la barre après une année 2019 catastrophique, où la pérennité du Bolsin était menacée. On a retravaillé sur les partenaires chacun de son côté. Nous avons une petite subvention de la Mairie de Bougue dont le premier élu est aficionado mais nous n’avons plus celles du département et de la région. »

Tertulias : « Comment va se dérouler cette journée?»

Colette Lacomme : « C’est une journée complète que nous proposons. Les arènes sont agréables. C’est un très joli Théâtre de Verdure. Tout commencera, après le casse-croûte, le matin à partir de 9h30 par les qualifications. Elles sont gratuites car nous pensons que c’est un spectacle de promotion de la tauromachie accessible à tous car sous la forme d’une tienta. C’est un moyen de la découvrir et d’avoir un premier regard sur la corrida.  On peut y venir en famille avec des enfants, le cadre s’y prête.  

Qualifications
Tienta
Matinale

Si on vraiment passionné, on arrive à 9h30 pour voir le niveau et la personnalité des dix participants. Mais quelqu’un qui vient pour découvrir, peut arriver en cours de tienta. Le dimanche matin, c’est un peu à la carte. Le midi on annonce les trois novilleros sélectionnés. Ensuite c’est le repas dans le foyer communal. S’il fait beau les gens peuvent même s’installer dehors. Ensuite, on revient aux arènes à 17h. Dans un premier temps chacun des trois qualifiés torée et tue un eral. Les deux meilleurs novilleros se voient attribué un novillo supplémentaire pour la finale qui désignera le vainqueur.

Pour ce qui concerne les tarifs. Cela fait quelques années que nous n’avons pas augmenté les prix. Le tendido est à 19 euros et la barrera à 25.  C’est gratuit pour les jeunes jusqu’à 18 ans. Nous proposons un forfait pour la journée complète à 32 euros. »

Merci Colette. Rendez-vous est pris pour le 5 mai pour ce nouveau bolsin de Bougue pour découvrir de jeunes talents et aider l’initiative de ce groupe d’aficionados de la Peña Soledad .

Propos recueillis par Philippe Latour et Thierry Reboul

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