Encastes

Les toros d’encaste Saltillo

L’histoire des Saltillo est celle d’hommes passionnés, rigoureux qui ont eu pour but de conserver le sang originel de cet encaste le plus pur possible. Malheureusement la mission est compliquée et les ganaderias issues de cette origine ont connu le sommet et sont souvent tombées au fond du gouffre.

A l’origine étaient les Lesaqueños

L’histoire des Saltillo nous fait remonter à l’origine de l’élevage structuré des toros braves. Certains voient même dans cet encaste , un des encastes originels de la Cabaña Brava.  En 1827 , Pedro José Picavea de Lesaca, navarrais devenu Maire de Séville, achète au Conde de Vistahermosa une des rames de son élevage. Ces toros , d’origine Salvador Varea / Ignacio Martín diffèrent du reste du bétail du Conde. Ils sont plus agiles, fins et d’une intelligence certaine. C’est ce qui fait écrire à certains qu’ils sont à part. Les « Lesaqueños » deviennent vite des toros à la mode par leur comportement en piste malgré leur physique « light ».  La présentation à Madrid se fait en 1932. Le créateur de la ganaderia a toujours refusé de croiser son bétail. Ses héritiers ont respecté ce choix.

Au début des années 1850, Antonio Rueda y Quintanilla, sixième marquis de Saltillo, âgé de vingt ans , achète l’élevage de Picavea de Lesaca. Le Marquis est un fervent aficionado. Sa fortune va lui permettre d’exprimer cette passion en élevant des toros sans céder aux pressions du mundillo. Il structure l’élevage et sélectionne avec rigueur. Les résultats sont au rendez-vous. « Petits mais costauds », les Saltillo remportent, en particulier à Madrid, de nombreux triomphes.

A la mort du Marquis, en 1878, sa veuve puis son fils Antonio Rueda lui succèdent. La gestion de la ganaderia va se ressentir du peu d’aficion de ses nouveaux propriétaires. Premiers compromis avec les vedettes, sélection approximative, d’adulés les Saltillo, malgré quelques bons toros, deviennent décriés. La situation va de mal en pis jusqu’au décès de Antonio Rueda en 1918. L’élevage est alors vendu à Félix Moreno Ardanuy. C’est de cette époque que datent les transferts vers les Amériques de toros d’encaste Saltillo.

Les grandes heures des Saltillo

En 1915, Félix Moreno Ardanuy, agriculteur « fortuné », créé un élevage avec du bétail de Francisco Correa (les futurs Pedrajas). En 1918, il achète la ganaderia, alors en ruine et ruinée, du Marquis de Saltillo. Il rapatrie le bétail sur la commune de Peñaflor, entre Séville et Cordoue . Le nouveau ganadero se met à l’ouvrage. Sa ténacité et sa rigueur sauve ce qu’il restait des anciens. « lesaqueños ». Il rachète un second fer, le met au nom de sa femme, Enriqueta de la Cova. Comme pour beaucoup d’élevages, la guerre civile a failli être fatal aux Saltillo . En 1939, il ne reste que quelques mâles, deux sementales et un troupeau réduit de reproductrices. Felix Moreno se remet au travail. Il reconstruit son élevage qui de 1940 à 1960 , sera un de ceux qui vend le plus de toros.

Travailleur acharné et perfectionniste, Félix Moreno est un homme prévoyant. Il organise sa succession de son vivant. Il a 9 enfants. En 1939, il achète un fer pour son fils Javier et autre en 1943 pour ses filles Enriqueta et Serafina.  Le fer de l’épouse de Felix Moreno est lui géré par son plus jeune fils Alfonso. Ce dernier possède également des toros d’origine Urcola. 

Le bâche et la reconnaissance

A la mort de José Enrique, les temps deviennent compliqués pour les Saltillo. L’encaste est pointue à élever et le moindre relâchement se paie cash. La division de l’élevage ne favorise pas les choses. Les derniers temps de l’ère des Marquis de Saltillo l’avaient déjà montré. Les toros ont de plus en plus de genio et sont forcément délaissés par les vedettes.  Alfonso s’efforce de redresser la barre avec une sélection très rigoureuse.

La famille Moreno a heureusement les moyens financiers qui permettent de le faire. En 1975, José Joaquin, le fils d’Alfonso, prend les rênes de la ganaderia. Il élimine les Urcola et se concentre sur les Saltillo. Il fait quelques apports de La Quinta, repérables à la morphologies de certains toros. Le travail paye à nouveau et l’encaste semble renaître de ses cendres. En 2013, José Joaquin rachète, la ganaderia de son oncle Félix, le seul autre fer de la famille qui existe encore. Il rassemble les deux troupeaux en choisissant le hierro d’origine du Marquis. Il fait courir depuis les produits issus de la réunification sous le nom de Saltillo.

Les résultats de l’élevage sont encore iiréguliers. Le fracaso madrilène (un toro condamné aux banderilles noires) de 2016 reste encore dans les mémoires . Il y a quand même des lueurs d’espoirs que devrait confirmer (souhaitons le) le lot prévu pour Céret en 2023.

Toro de Saltillo, Madrid
Toro de Saltillo, Madrid
Toro de Saltillo, Madrid
Miguel Zaballos: les Saltillo « noirs »

Ayant perdu lors de la guerre civile, le bétail de leur première ganaderia, les Hernandez Pla en recréé une nouvelle dans leur finca andalouse.  L’origine, comme chez Pablo Mayoral est très diverses et hétérogène . On y retrouve du bétail provenant des ganaderias Duc de Pinhoermoso, Albaserrada (par Escudero Calvo), Samuel Flores, Vicente Martínez et Santa Coloma.  Le bétail est en fait du Saltillo avec la particularité d’avoir une robe noire dont l’origine se perd dans la nuit des temps et d’éventuelles influences ibarreñas. Admis en 1950 à l’UCTL, les deux frères José Maria et Estebán Hernández Plà se partagent toros et vaches en 1960.  Esteban ne reste ganadero que trois ans. En 1963, il vend sa ganaderia à Miguel Zaballos Casado.

Miguel décède en 1978, la ganaderia est alors gérée par sa file et son gendre. Eleveurs de mansos, ils sont peu expérmentés en élevage de toros braves, ils agrandissent le troupeau, douze ans plus tard, en faisant un apport de bétail d’origine Clairac d’encaste Gameiro Civico. Les différentes origines sont maintenus séparées. En 2010, Miguel Hernández Zaballos, fils de Felipe, prend la direction de l’élevage. Il ne conserve que les Saltillos et se consacre à les améliorer. De bons novillos de ce fer sortent en particulier en France. La crise, le COVID, la prédominance du Domecq ont raison de l’envie du ganadero. A ce jour, il n’y a plus de bétail brave chez Miguel Zaballos. Ainsi ont disparu les Saltillo  negros.

Novillo Miguel Zaballos , Orthez 2013
Novillo Miguel Zaballos , Orthez 2013
Novillo Miguel Zaballos , Orthez 2013
Enrique Dominguez les Saltillo cachés

En Navarre, on élève le bétail brave essentiellement pour les « festejos populares ». Enrique Dominguez est un de ces ganaderos qui fournissent les spectacles de rue très prisés dans les villages au Pays Basque espagnol. A l’instar de son beau frère José Antonio BaÏgorri, propriétaire du fer de Pincha, Enrique Dominguez a dans l’idée de se présenter au moins en novilladas.

Amoureux de l’encaste Saltillo, il achète en 2010, la ganaderia et le bétail de Jesús Pérez-Escudero. Il mêne avec son cousin Adrian, ce troupeau en parralèle avec celui hérité dune longue tradition familiale de ganaderos navarrais. Pour ces deux origines les Dominguez pratiquent une sélection rigoureuse. Leur Saltillo sont à l’heure actuelle, le seul réservoir de cet encaste en dehors de la maison mère. La caste infatigable et le poder du novillo vainqueur du trophée des « Toros con Soga » donnent envie de voir les cardeños de la famille Dominguez ailleurs que dans la rue.

Synthèse

En Europe, il ne reste que deux ganaderias d’encaste Saltillo. Cela repésente au plus 106 vaches et 6 sementales.. Le moindre problème sanitaire et le sang originel sera perdu. Malgré leurs origines, il est trop tôt pour compter sur les produits d’Enrique Dominguez pour assurer la préservation de l’encaste. La plupart des autres fers européens d’origine Santa Coloma sont de plus en plus « Buendia/La Quinta). Le toro mexicain est aujourd’hui trop spécifique pour être un réservoir de reproducteurs. L’encaste est en réel danger de disparition

Caractéristiques morphologiques principales
  • Le Saltillo est un toro avec un trapio moyen. Les armures sont « raisonnables » mais astifinas et veletas.
  • Ils sont soit cardeños (ganaderia Saltillo) , soit negros (Miguel Zaballos) .
  • Peu de morillos mais leur cou est long.
  • Les extrémités sont fines
  • Profil droit, une tête allongée et frisée,des yeux grands et globuleux, un museau de souris (qui se retrouvera chez les Buendia par exemple)
Comportement en piste
Premier tiers
  • Nerveux et agressifs, ils sont compliqués à manipuler (campo, corrales)
  • Dès leur sortie du toril, ils sont agressifs et attaquent plus qu’ils ne suivent la cape.
  • L’encaste est très irrégulière au cheval. Ils peuvent êtres braves ou bien se comporter en mansos (parfois perdidos).
  • La longueur de leur cou autorise une bonne capacité à humilier chez les meilleurs
  • Au contact du fer, ils manquent de poder
Second tiers
  • Ils coupent le terrain. Agressifs, les Saltillos sont très difficiles à banderiller.
Troisième tiers
  • Ont une charge lente avec la tête à mi-hauteur. Ils s’expriment mieux quand ils sont toréés en ligne droite .
  • Ils ont tendance à chercher les chevilles des toreros.
  • Le matador doit faire preuve d’autorité et de confiance s’il ne veut pas se retrouver dans une situation difficile, voire inconfortable.
  • Ils apprennent vite et ne pardonnent pas les erreurs. La moindre faute les rend très compliqués.
Faits marquants de l’histoire de l’encaste
  • ‘Conocedor’, qui, en 1859 à Madrid, prit 20 piques et tua 6 chevaux,
  • ‘Jabaito’ qui à Séville le 19 avril 1878 prend 13 piques et tue 5 chevaux
  • ‘Valenciano’ qui le 25 juin 1881 à Jerez prend 14 piques et tue 6 chevaux.
Principales ganaderias de l’encaste en Espagne
  • Saltillo
  • Enrique Dominguez
Principales ganaderias de l’encaste en France

Encaste non représenté en France

Sources : www.terresdetoros.fr, Corps des Présidents et Alguaciles de corridas, Chaine You Tube « Les Encastes »

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