Reportage Ganaderos

Pincha: braves et nobles à la fois

Une pub pour une société de crédit s’évertue à démontrer que les préjugés sont d’autant plus dépourvus de raisons qu’ils sont ancrés dans l’inconscient collectif. Le monde des toros a lui aussi son lot d’idées reçues et de doctes sentences. Deux nouveaux tentaderos à Lodosa, chez Pincha, ont montré combien certaines idées reçues étaient fausses.

Préjugé n°1: « Les Domecq manquent de bravoure »

José Antonio Baigorri, le propriétaire de la ganaderia de Pincha, nous a reçu à deux reprises en décembre pour assister à la tienta des vaches de son fer.  Le ganadero accorde une grande importance au comportement de ses pupilles face au cheval.

Les huit becerras tientées ont pris de six à huit piques chacune. Les puyazos étaient appuyés et longs. Le piquero ne leur a jamais fait de cadeaux. Elles sont revenues au cheval sans rechigner et avec une bravoure certaine. Avec parfois des défauts ou des comportements éliminatoires, elles firent preuve de caste au contact du fer malgré des conditions (état de la piste et météo) très difficiles. Le niveau d’exigence est élevé, peu seront retenues. Toutefois le niveau des vaches est un bon indicateur de celui que peuvent atteindre les mâles. Les Domecq peuvent donner des premiers tiers « à émotion ».

Préjugé n°2 : « Trop piquer nuit à la durée des faenas».

Après des premiers tiers « éprouvants », les vaches tientées ont pris entre 120 et 150 muletazos en embistant et humiliant du début à la fin de la faena. Aucune n’est tombée malgré un ruedo « patinoire ». La durabilité n’est pas altérée par le premier tercio, si la caste est présente.

Préjugé n°3: « Les bichos pour les toreristes ne sont pas pour les toristes, et inversement. »

Ces deux tientas ont permis de voir et revoir des toreros qui ne sont pas des figuras mais qui face à un bétail encasté, et souvent exigeant, sont capables d’allier sens de la lidia et expression artistique. Deux toreros retirés ont pris les trastos. Pedro Carra et Francisco Javier Corpas, vus en France il y a quelques années, se sont régalés. Et nous nous sommes aussi régalés.  Leur technique fluide, leur envie de toréer, de bien faire ont permis de mettre en évidence le bétail.

Paco Ramos, Gomez del Pilar et le vénézuélien Rafael Orellana, avec une tauromachie plus moderne, ont su se mettre au service des animaux avant de toréer chacun dans leur style. Dans les tribunes de la placita de la ganaderia de Pincha, toristes et toreristes ont passé un bon moment.

En conclusion

Seul José Antonio sait quelles seront les vaches retenues pour assurer l’avenir du fer de Pincha. Pour celles qui le seront, il lui reste à l’associer au semental qui complètera et améliorera la qualité de la future reproductrice. Ce qui est sûr, c’est qu’une corrida avec six bêtes du niveau vu en tienta serait une « corrida entrenue » plaisant aux toreristes et aux toristes. Pincha, et c’est le fruit de cette sélection, est très bien sortie en 2022 que ce soit à Pampelune, Calasparra ou Lodosa. Ce fer progresse à la fois en niveau et en homogénéité. Le travail paye, et ce n’est pas un préjugé, cette ganaderia sera à suivre de près dans les prochaines temporadas.

Thierry Reboul

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