Séville : Roca Rey surclasse les Victoriano
Séville : Roca Rey surclasse les Victoriano
DEL RIO EN DEMI-TEINTE
Andrés ROCA REY au cartel, c’est l’assurance de placarder le « No hay billetes ». Beaucoup de monde donc. Le public est plutôt jeune, costumé cravaté et gominé, comme il se doit à Séville. Un public festif, porté sur le gin tonic et prompt à réagir au moindre froncement de sourcil de son idole. Il ne sera pas déçu, le Péruvien, héritant du sorteo le meilleur, a enflammé la Maestranza, tutoyé la Porte du Prince et confirmé sa place de numéro 1 actuel.
Résumé
Les toros
6 toros bien roulés, de gabarit modeste, en phase avec le lieu, à l’exception du 3 vraiment anovillado. Les six portent le fer et la devise de Victoriano del Rio. Les armures sont fines sans agressivité excessive. Faibles et de jeux variés, mobiles les 3 et 6 et à un degré moindre le 1. Les autres sont décastés sans option. Au cheval, passage obligé pour le minimum règlementaire. Quel contraste avec l’encierro de la veille !
Les toreros
Les toreros du jour ont tous manifesté une volonté de bien faire et ont effectivement effectué ce qu’ils ont pu, face aux adversaires qui leur étaient opposés. Le sorteo a réparti l’envoi de façon arithmétique : les deux bons pour Roca Rey, les deux infumables pour Ortega et un de chaque pour Perera.
Miguel Ángel PERERA
Après avoir frôlé la veille un succès conséquent, l’Extremeño revient aujourd’hui avec la volonté d’en découdre. Son premier adversaire sort sur les rotules de deux piques trop appuyées pour ce qu’il est capable d’endurer. Il va confirmer sa faiblesse sur le quite d’Ortega. Après brindis au Juli, Perera entreprend une faena dont l’objectif principal est de maintenir l’animal debout. Dommage car le bicho possède un fond de noblesse permettant de lier quelques passes au ralenti notamment sur la gauche. La faena d’infirmier est exempte d’émotion. Tejera envoie la musique pour récompenser les efforts du torero. Le toro se décompose et entraîne progressivement Miguel Àngel vers le terrain du toril pour y recevoir une entière tombée. La pétition est jugée minoritaire. Vuelta qui récompense un engagement qui n’a pas échappé au public. Silence à l’arrastre.
Sorti en 4, Desgarbado est un negro décasté. Sa faiblesse lui fait enfouir à plusieurs reprises.ses cornes dans le sable. La charge est courte, l’animal ne se livre jamais et se désintéresse rapidement de la muleta de Perera qui en termine par une entière perpendiculaire. Silence et sifflets au toro.
Juan ORTEGA
La grande déception du jour. L’Andalou hérite de deux babosas. Le premier est faible et décasté, il passe son temps à s’échapper vers le toril. Juan s’évertue à le replacer, mais le toro n’a pas l’once d’un début de charge, il se défend sur place par des retours brusques. Le diestro abrège par une entière trasera tendida. Silence. Bronca à la dépouille.
Son deuxième adversaire prend volontiers deux piques dans un mauvais style, conclues par une ovation abusive à Óscar Bernal. L’entame de faena est agréable, mais dès la première série donnée de la gauche, le toro dévoile un coup de tête agressif qui conclut chaque passe. À droite, le défaut est également présent. Juan, malgré plusieurs tentatives de changement de sitio, ne peut corriger la tête baladeuse. Il abdique après nouvelle tentative à gauche, avec un hachazo lui frôlant la jugulaire. Entière tombée. Silence. Sifflets au toro.
Andrés ROCA REY
Un pas vers la Porte du Prince
L’empereur est venu, nous l’avons vu, il a vaincu. Très favorisé par le tirage au sort, le Péruvien n’est pas passé à côté de Manisero, petit format negro de 501 kg, face auquel A2R fait figure de géant. Entame estimable au capote portant sur le public. Intelligemment l’animal est épargné au cheval en deux picotazos pour la forme, et Antonio Chacón est appelé à saluer après un bon tercio de banderilles. Brindis a todos dans l’euphorie générale.
Le début par statuaires calmes et allurées, terminé par une passe du mépris, laisse entrevoir une charge claire de l’animal. Andrés se place au centre et déclenche l’embestida en augmentant la distance, ce qui n’est pas sans nous rappeler le grand César Rincón. Et cela fonctionne, le toro vient de loin pour s’enrouler dans la muleta du diestro, qui lie les passes au ralenti, sans jamais se faire toucher le leurre. Musique !
À gauche, la charge est tout aussi limpide, les naturelles, circulaires et changements de main s’enchaînent, sans solution de continuité. Roca a l’intelligence de laisser respirer son adversaire entre chaque série, ce qui permet à la faena de durer et d’aller a mas face à un adversaire de classe. Grande épée dans la croix, un peu inespérée, le toro distrait par les tendidos ayant au dernier moment tourné la tête. 2 oreilles très fêtées et ovation à la dépouille de Manisero.
Hélas l’épée
Bis repetita… Espiguita, negro de 550 kg, est le plus lourd du lot. Le Péruvien s’en empare pour une série de véroniques en avançant vers le centre, s’accommodant des rafales de vent et soulevant le conclave. D’un simple frémissement du revers du capote, le toro est mis en suerte. Il est ménagé par Sergio Molina, qui est ovationné pour ne pas avoir piqué. Signe des temps. Brindis privé. Le début par statuaires sous le vent est interrompu par un désarmé inopportun.
Mais A2R se reprend et nous offre une superbe série de la droite, soyeuse, en s’enroulant littéralement le bicho autour de lui, ce qui déclenche la musique. À nouveau, Roca laisse respirer son adversaire et lui donne confiance, avant de l’embarquer pour des séries des deux mains, révélant la noblesse de Espiguita. Sur la gauche, le toro baisse d’un ton, mais Andrés s’en accommode en trouvant le bon sitio. La faena est moins profonde que la précédente, mais la Porte du Prince n’est vraiment pas loin. Hélas, deux pinchazos viennent gâcher la fête. Estocade caída au fil des tablas. Silence, et applaudissements à l’arrastre.
Conclusion
Ceux qui étaient venus pour le capote de soie de Juan Ortega ont été marris. En revanche, les supporters de Roca Rey sortent ravis, mais quelque peu déçus de ne pas avoir pu l’attendre à la sortie de la porte donnant sur les berges du Guadalquivir.
Olivier Castelnau
Fiche technique :
- Séville. 11 ème de feria. Toros de Victoriano del Rio, de présentation modeste et de jeu varié, mobiles le 3, le 6 et à un moindre degré le 1. Faibles et sans option les trois autres.
- Miguel Ángel PERERA : vuelta, silence
- Juan ORTEGA : silence, silence
- Andrés ROCA REY : 2 oreilles (avis), silence
- 12 piques
- Salut de Antonio CHACÓN au troisième
- Plein, guichets fermés.
- Soleil, petite brise, température agréable