Lunel : Olga Casado fait chavirer le public
Lunel : Olga Casado fait chavirer le public
L’affiche très inspirée, créée pour l’occasion par l’artiste peintre nîmois, ancien matador, Jonathan Veyrunes, l’annonçait en lettres capitales. La traditionnelle corrida des Pescalunes serait, en 2025, extraordinaire. Mixte dans tous les sens du terme. Mixte au sens strictement tauromachique, puisque composée de toros et de novillos, et mixte au sens genré du terme, par une parité homme-femme scrupuleusement respectée. Un des intérêts de cette course est de permettre aux néophytes de goûter à chaque aspect de la fiesta brava : rejon, novillada et corrida formelle.
On ne change pas un cartel gagnant. Le trio Vicens, Castella,Talavante est donc reconduit après les triomphes des deux éditions précédentes. Mais l’événement attendu ce jour est la présentation en France de la novillera madrilène, Olga Casado. La jeune femme a marqué les esprits cet hiver à Madrid en coupant une queue, lors du festival de Vistalegre, donné au bénéfice des victimes des intempéries valenciennes. Ce jour-là, elle a damé le pion à tout le haut du panier de la toreria, devant la planète taurine qui s’était déplacée en masse. Son passage à Lunel suscitait donc un intérêt particulier.
Résumé
Les toros
Un patchwork issu des ganaderias de Bohórquez pour la partie à cheval, le must dans cette discipline, et Victoriano del Rio & Toros de Cortes pour les piétons. Diversement présentés selon les critères d’une plaza de troisième catégorie avec une constante : des armures plus que discrètes. De cet envoi hétérogène ressort le novillo du fer de Victoriano del Rio sorti en 4ème position, le seul animal véritablement encasté. Pour le reste, beaucoup de faiblesse, de mansedumbre et de manque de race.
Les toreros
Léa Vicens, que nous avons connu mieux inspirée ici dans son jardin, nous a laissé sur notre faim, malgré deux trophées accordés. Sébastien Castella coupe in extremis deux oreilles généreuses à son deuxième adversaire et sauve sa tarde. Alejandro Talavante, certes mal servi par le sorteo, aura passé une après-midi inconfortable. Très attendue, Olga Casado a confirmé tout le bien qu’on pensait d’elle, en réalisant une faena importante à son premier novillo de grande classe. Son deuxième adversaire, détruit à la pique, ne lui a pas permis d’asseoir son triomphe.
La corrida vue par l’objectif de Daniel Chicot
Léa Vicens
1° toro – Fermin Bohórquez 517 kg
En premier lieu, Léa Vicens hérite d’un toro de trapio correct mais exagérément afeité. Il est brindé à Olga Casado. L’animal manque de mobilité. La cavalière pose trois farpas qui ne réveillent pas le toro, qui demeure tardo au centre du ruedo. Bonne paire de banderilles au quiebro. Sur Diluvio et Greco, la Nîmoise nous montre la toreria de ses deux montures et les qualités de leur dressage avec des banderilles posées à l’étrier. L’ensemble manque cependant de brio pour réveiller les tendidos. Un rejón de mort trasera pour en finir, et une oreille plus réclamée par les peones que par le public.
5e toro – Fermin Bohórquez 509 kg
Le second adversaire de la cavalière est un joli bicho emorillado, mais les cornes sont à nouveau très raccourcies. Le toro remate fort dans les tablas. Il est nettement plus mobile que le précédent, et sur les accélérations, Léa Vicens se met en danger. Sur Betico et Pantera, les séquences sont magnifiques avec des changements de pied de haute école. Le toro accuse le châtiment excessif des trois rejons initiaux et baisse de ton jusqu’à finir épuisé, immobile au milieu de la piste. Juste le temps pour Léa Vicens de poser deux banderilles courtes en forme de roses, clin d’œil aux frères Peralta dont le cadet Rafael vient de disparaître, il y a quelques jours. Nouveau rejón de mort en arrière mais efficace et nouvelle oreille.
Sébastien Castella
2° toro – Victoriano del Rio 508 kg
Le premier opposant de Sébastien Castella est de trapio correct mais pauvre de tête. Le capoteo par véroniques est applaudi. Le toro va seul au cheval pour un picotazo et est remis en place pour une deuxième pique sans pousser. Le bicho est sans intérêt, soso, flojito. Le Biterrois se contente d’une faena ambidextre minimale. L’animal est difficile à cadrer, un avis sonne après une demi-lame caida. Deus descabellos pour en finir. Silence.
6°toro – Toros de Cortes (sobrero) 501 kg
Le titulaire de Victoriano del Rio est un invalide, rapidement remplacé par un exemplaire de Toros de Cortes, laid, avacado, mal armé et décasté. Dans le capote de Castella, le toro donne des signes de faiblesse. Économisé en une légère piqûre, il est offert à Léa Vicens et Olga Casado. Le début de faena est ennuyeux et terne face un animal qui manque de race. Le diestro n’a d’autre solution que d’opter pour un trasteo pueblerino qui a le mérite de réveiller les étagères. Final par circulaires en regardant les gradins. Grande estocade en toda ley de laquelle le Bitterois sort bousculé sans gravité. Deux oreilles, la deuxième sans objet.
Alejandro Talavante
3° toro – Victoriano del Rio 509 kg
Le burraco sorti en 3ème position est peu armé. Le capoteo est discret. L’animal prend une pique trasera sans style. Après un début de faena par doblones allurés gagnant le centre, Talavante propose une faena quelconque, à mi-hauteur sans profondeur. Le strict minimum, conclu d’un 1/3 de lame tombée après pinchazo. Deux descabellos. Silence.
6°toro – Victoriano del Rio 495 kg
Pour deuxième adversaire, l’Extremeño hérite d’un castaño qui prend une longue pique, carioquée et pompée. À aucun moment Talavante n’a pu s’accorder avec un toro à la charge brusque sur les deux pitons. Rapidement, après un désarmé humiliant, il prend l’épée sous les sifflets pour trois pinchazos, avant une entière basse et trois descabellos. Bronca.
Olga Casado
4e Novillo de Victoriano del Rio 443 kg
Attendue comme le Messie, Olga Casado est appelée à saluer. Le novillo est bien fait mais pauvre de tête. La novillera l’embarque dans une série de véroniques, genou ployé, de grande classe. Le Victoriano del Rio prend un bon puyazo poussé, en mettant les reins. Il s’ensuit un quite par tafalleras faisant lever les gradins. Le novillo est brindé à Sebastien Castella. Après avoir doublé l’animal de façon élégante, genou ployé, la Madrilène manque se faire accrocher par excès de confiance. Le bicho est encasté.
Olga Casado va vite comprendre que son adversaire peut devenir un bon collaborateur, à condition de se croiser et de s’imposer. Ce qui va être fait par des séries des deux mains allurées et toréées, portant sur l’animal. La faena va a mas pour se terminer par trois circulaires débutées de l’arrière, faisant rugir le conclave. Miguel Abellan lui donne les derniers conseils depuis le callejon, avant une estocade entière et contraire, rapidement efficace. Deux oreilles méritées et vuelta fleurie.
8e Novillo de Victoriano del Rio 462kg
Le second adversaire de Olga Casado est un novillo gacho, aux cornes en pince de crabe. Les véroniques sont suaves et templées. Le novillo semble propice à offrir un nouveau succès. Hélas, c’est sans compter avec l’œuvre de destruction du picador qui lui donne un puyazo assassin dans l’épaule. Le quite qui suit par gaoneras est exquis. Le toro sort du deuxième tiers aplomado puis tardo, sans qu’il ne soit possible de lui tirer une quelconque série. La faena est très longue face à un animal qui ne répond aux toques que par des hochements de tête. Le président a perdu sa montre. Final interminable pour une entière après pinchazo et un avis. Palmas.
Conclusion
À l’issue de ce marathon taurin en pleine chaleur, entrée à 17h et sortie à 21h, éprouvant pour les organismes, les sentiments sont mitigés. La satisfaction du jour vient sans conteste de la jeune prodige Olga Casado, qui a une nouvelle fois démontré tout son potentiel, en dominant la corrida de la tête et des épaules. Grande déception de la part d’Alejandro Talavante, peu concerné. Castella et Léa Vicens récoltent un triomphe a minima et nous doivent une revanche.
Olivier Castelnau
Fiche Technique
- Lunel. Arènes Francis San Juan. 2 toros de Bohórquez , 4 toros et 2 novillos de Victoriano del Rio et Toros de Cortes (sobrero) pour :
- Léa Vicens : Oreille – Oreille
- Sébastien Castella (Bleu roi et or) : Silence – 2 oreilles
- Alejandro Talavante (Perle et or) : Silence – Bronca
- Olga Casado (Neige et argent) : 2 oreilles – Palmas
- 7 piques, Cavalerie Heyral
- Sobresaliente : Salvador Ruano
- Olga Casado se présentait en France.
- Président: Monsieur Gauthier
- Plein apparent
- Soleil. 30 °C.